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Jean-Michel Blais : pour un Festivoix introspectif

par Luc Drapeau

Qu’on aime, qu’on n’aime pas, qu’on accourt vers la saveur du jour ou vers des artistes moins connus, moins usés ou moins portés aux nues, plusieurs des noms figurant dans la programmation diversifiée du Festivoix 2018 sauront vous faire passer un bon moment.

Il y a ces musiques…

Il y a ces musiques qu’on aime écouter quand on a envie de mélanger notre voix au grain feutré ou dynamique de celle des chanteurs et des chanteuses – souvent avec des résultats douteux cependant – en faisant la vaisselle ou toute autre activité de même acabit. Il y a ces musiques qu’on écoute pour les paroles qui nous donnent matière à pensées et à serments devant l’insoutenable. Il y a ces musiques qui électrifient tous les nerfs de notre corps et qui pulsent le sang dans nos veines pour que l’on rejoigne la fête. Il y a ces musiques qui offrent aux oreilles la pureté d’un accord et aux yeux la dextérité hors du commun d’un musicien ou d’une musicienne. Il y a ces musiques qui créent des paysages sonores, qui nous amènent à rêvasser tout haut, à sculpter dans les nuages et à lire dans les formes du monde pour y veiller l’indicible. C’est à cette catégorie de musiques que je m’attarderai dans le cadre du Festivoix de cette année à travers la personne de Jean-Michel Blais, pianiste mauricien qui fera partie du volet Les voix classiques le 7 juillet prochain.

Jean-Michel Blais

Après un premier album intitulé Il, qui a connu un succès critique en plus d’être classé parmi les dix meilleurs albums de 2016 par le magazine Time, le compositeur sortait Dans ma main, son nouvel opus, le 11 mai dernier. À n’en pas douter, le travail collaboratif qu’a effectué Jean-Michel Blais avec le réalisateur et musicien électro Mike Silver, alias CFCF, et qui a donné lieu à la création de l’album Cascades, a assurément bonifié la démarche de l’artiste sur son présent ouvrage.

Le jeu des comparaisons et l’obligation de nommer

Les étiquettes « classique », « avant-garde » ou « post-rock » servent souvent de fourre-tout visant à circonscrire des démarches qui s’évertuent à transcender les frontières entre les styles. Sans être typiquement classique, contemporaine ou ambiante, la musique de Jean-Michel Blais se veut libre, débordante des cadres et rebelle aux conventions dans lesquelles on pourrait être tenté de l’enfermer. Ainsi, sur divers aspects de l’oeuvre de Jean-Michel Blais jusqu’ici, le jeu des comparaisons force des rapprochements avec Yann Tiersen, Philip Glass ou Chilly Gonzales. À l’écoute de son précédent album, il paraît évident que la pièce Budapest rappelle la pianistique sautillante du copain Chilly sur certains titres de ces solos piano I et II. Certains argueront que certaines pièces proposent des « flashs » à la Einaudi, d’autre des « filtres » à la Hauschka ou à la Eluvium.

Voyager sur place

Peu importe, les influences de Jean-Michel Blais, sa polyvalence et sa maîtrise pianistique, conjuguées à son habileté à densifier le travail harmonique par le biais de l’électronique me font voyager dans les miennes. Parfois, certains mouvements me rappellent les égarements mélancoliques de l’Islandais Olafur Arnalds avec qui il partagera une scène du Festival de Jazz de Montréal à l’occasion d’un programme double cet été. Parfois aussi il me vient à l’esprit des ambiances que j’associe à Radiohead, des cadences qui me rappellent le compositeur allemand Nils Frahm ou des univers sonores qui ont des parentés avec l’insaisissable Britannique d’Origamibiro. Ce qui me fait dire au final que l’important, ce n’est pas la destination, mais le voyage : celui qui nous fait traverser toute une gamme d’émotions, d’expériences et de moments qui nous ont marqués.

Merci pour le voyage et bon festival !